B comme ""Baby Boy".
Publié par Ophélie sur Bombayser2Bombay (blog privé).
Samedi matin, on sonne à ma porte, un coups d’œil à mon portable :
8heure. Encore !!!! Grrrrrr Je saute du lit, et me rue sur la porte,
bien décidée cette fois à faire comprendre au trash wallah (le gars qui
passe ramassé les poubelles chaque matin) que si je ne sors pas mes
ordures sur le pallier c’est qu’il n’y en a paaaaaaaaaaaaaaaaaas!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
Telle
une furie, je fais sauter tous les verrous, et m’apprête à jeter le
mauvais œil à cet importun, qui devance chaque matin mon réveil d’une
demi-heure…mais je tombe nez à nez avec mon voisin du dessous, tout
sourire, un plateau de pâtisserie jaune flashies à la main…
Bon, je ravale mon venin et lui demande qu’est ce qui me vaut l’honneur de cette pâtisserie matinale … « I’ve got a boy » (j’ai eu un fils)…ah alors si c’est un garçon .. Congrats !
Ensuite, en bonne occidentale, je lui demande comment il se prénomme. Embarrassé, il me répond « Baby boy ». Singularité tout indienne, on nomme l’enfant pour le «Hawan», cérémonie hindoue célébrée plusieurs semaines après la naissance. Le rituel a lieu autour d’un feu sacré, avec un prêtre et une multitude d’invités. En attendant on l’appelle donc «Baby», en anglais, ou bien «Guria», en hindi, qui signifie « poupée ».
Une des raisons à l’origine de cette tradition, était le fort taux de mortalité infantile. On attendait donc une quarantaine de jour avant de prénommer l’enfant. Le feu, symbole cathartique, permettait aussi de purifier la maison après l’accouchement. Avant la cérémonie du prénom, l’enfant reste ainsi, confiné dans la maison avec les femmes. Beaucoup d ‘entre elles, reviennent d’ailleurs, après l’accouchement, vivre quelque temps – et sans leur mari – dans la maison familiale. Le mari qui n’est pas non plus autorisé à assister à l’accouchement…
Autre grande coutume indienne : le point noir dessiné chaque matin sur la tête du bébé, et qui est censé le protéger du mauvais œil.
Faut pas oublier que la préférence pour les garçons est une tradition solidement ancrée en Inde. Le fils, transmet l’héritage et s’occupe de ses parents jusqu’à leur mort. C’est lui qui libère, selon les rites hindous, l’âme en récitant une ultime prière avant la crémation. La fille, “celle qui part”, va vivre dans la famille de son époux en échange d’une dot. Cette dot qui est à l’origine de nombre d’infanticides et d’avortements sélectifs….
D’après le dernier recensement, qui date de 2001, l’Inde compte 927 filles pour 1000 garçons. L’ONU estime que “60 millions de filles sont manquantes en Inde”. Ce déséquilibre a déjà entraîné une hausse du nombre de mariages d’enfants et du trafic de femmes en provenance des régions pauvres de l’Inde et des pays voisins comme le Bangladesh et le Népal.
Le gouvernement a d’ailleurs lancé, à l’occasion de la Journée internationale de la femme, une campagne d’affichage pour changer ces attitudes. “Les filles prennent généralement mieux soin de leurs parents âgés que les garçons »
Et depuis 1994, les médecins ne sont pas autorisés à dévoiler le sexe des fœtus. Malgré cette interdiction, la pratique de l’avortement sélectif est répandue, voire même amplifiée avec la démocratisation des machines à ultrasons ; et seul un médecin, en quatorze ans, a été condamné.
Enfin, les différents programmes gouvernementaux (« cradle baby” scheme, “girl protection schemes ) pour limiter le nombre d’infanticides et d’avortements sélectifs, avec des incitations financières ont eu jusqu'à maintenant qu'un succès mitigé.
Tandis que la naissance d’un garçon est perçue comme l’opportunité d’une mobilité sociale ascendante (vive la socio !!) la naissance d’une fille est toujours considérée comme un fardeau économique. A quand le "baby girl boom" en Inde???