Publié par Geoffroy & Olivia.
Le sujet du mois est l’élégance bombayite !
Autrement dit, l’élégance à
Bombay.
S’agit-il
de savoir si Bombay est une ville élégante ou si Bombay compte
beaucoup d’élégantes ? Non, il s’agit en fait de disserter sur la
présence de l’élégance à Bombay. Et là le sujet prend toute sa dimension
cosmique, car voilà bien une question sur
laquelle notre avis a beaucoup évolué !
La
question est néanmoins difficile et il nous faut les secours du
dictionnaire pour se rappeler que l’élégance se définit comme étant
la « qualité qui se
caractérise par une grâce faite d'harmonie, de légèreté et
d'aisance dans la forme et les lignes, dans la disposition et les
proportions des parties, dans le mouvement. »
Alors à Bombay qu’en
est-il ?
L’une des choses qui frappent l’œil
occidental, lorsqu’on arrive à Bombay, est le sari ! Beaucoup de
femmes, dans la rue ou au bureau, portent un sari et ce vêtement est par
nature élégant, ce qui semble par
ailleurs avoir échappé à Jules Vernes qui ne voyait dans le sari
« qu’un vêtement qui les enveloppait de la tête aux pieds » (dans « La
Maison à vapeur »).
On ne résiste pas à l’envie dans cet
article de rappeler que le sari s’inscrit dans une légende puisque
son histoire est millénaire. On raconte qu’un jour la sublime Draupadi, enjeu d’un duel, fut gagnée par le
clan adverse. Le Dieu Krishna promit alors de
protéger sa
vertu, ce qui fit qu’au moment où les vainqueurs décidèrent de «
profiter de leur gain » ils ne purent qu’attraper le bout d’un tissu
diaphane qui la drapait modestement, certes, mais encore
d'une manière séduisante. Ils continuaient à tirer sur le tissu et
essayaient de le retirer pour la déshabiller, mais en vain. C’est ainsi
que la vertu triompha de nouveau dans cette épopée
indienne vieille de 5.000 ans appelée le Mahabharata.
Six mètres de tissu pour cinq millénaires
d'histoire. Quel vêtement pouvait rêver d'une plus belle longévité ?
Mais le sari n’est pas l’apanage des dieux et un charmant
conte populaire en donne une origine plus poétique : "On dit du
sari qu’il est né sur un métier à tisser de l’imagination d’un
tisserand qui en rêvant d’une femme, a voulu représenter sur le tissu le
miroitement de ses larmes, la cascade de ses cheveux longs,
les couleurs de beaucoup de ses caprices et la douceur de son
contact. Il a tissé tous ces attributs ensemble sans pouvoir s’arrêter
fabriquant ainsi plusieurs mètres de tissus. Et quand
finalement il a terminé, il s'est assis et a souri, a souri et a
souri encore."
Vous
l’avez compris, le sari est un vêtement élégant porté au quotidien
par beaucoup de femmes de Bombay.
Bien
entendu il existe des différences dans la manière de porter le sari
et surtout des différences dans les tons et couleurs des saris. Et
sans jeu de mots vestimentaires, c’est là que le bas blesse, car on sent
bien que l’on n’a pas forcément les mêmes règles
d’harmonie chromatique et (toujours sans jeu de mots vestimentaire)
on voit bien qu’il y a un GAP culturel. Mais la palette de couleurs est
large et nous avons vu souvent de magnifiques
saris !
Et l’élégance vient aussi des parures et des
bijoux portés par les femmes indiennes et on sait tous
l’importance des bijoux en Inde et la place toute particulière de
l’or en Inde. A cet égard cette élégance est très présente à Bombay.
Chez la femme indienne élégante, la chevelure se remarque
et participe de cette élégance. Dans les cocktails ou au restaurant,
notamment le soir, l'élégance indienne est souvent très
présente et plus recherchée.
Mais, l'élégance ne serait-elle que féminine ?
Il faut hélas, à notre grand dam, convenir que l'élégance homme est
quelque chose de plus rare ! Il serait plus juste de parler d'élégance
ohm (unité de résistance électrique) car en la
matière, l'homme de la rue résiste, le courant passe moins. Et
pourtant, la mode homme existe avec de magnifiques kurtas et jaquettes
brodées qui font rêver. Cette élégance là existe davantage
dans les magazines que dans la rue.
Plus
généralement on peut dire qu’en matière de mode et d'élégance,
l’Inde a conquis son indépendance dans les années 80. Pendant que
l'Inde et ses mannequins sont « trendy » de Paris à New York, de grands
"acheteurs internationaux" jettent un regard attentif aux
nouvelles créations provenant de Bombay, Delhi ou Madras. Déjà
quelques stylistes indiens sortent du lot et imaginent la fusion entre
la traditionnelle "indian touch" et la "silhouette
occidentale".
Les
longs jupons chatoyants de bohémienne chic, brodés de perles,
miroirs et clochettes de Ritu Kumar rivalisent avec ceux exhibés sur
le papier glacé des grandes revues. Les jupes cloches de Manish Arora
bordées de fourrure, rehaussées de dentelle de cuir ou
plastique sur soie sauvage jaune ou violine façon princesse se
vendent à Paris. Les jupettes épurées en voile de coton plissées à la
manière du Rajasthan de Rajesh Pratap Singh trouvent acheteurs
de Tokyo à Singapour.
De
nombreux stylistes tels Neeta Bhargavan, Ritu Kumar, Rohit Bal, Ritu
Beri, Manish Malhotra, Poonam Babariva, Anshita Asnani commencent à
se faire reconnaître sur les grandes places internationales.
Oui
l’élégance existe à Bombay, mais pour la voir il faut connaître le
pays et ses racines, et il faut surtout abandonner ses lunettes
occidentales.